L'espoir de la vie.

~ L'espoir de la vie ~

PV: Griselle - Plume d'Ambre

---

---

Je suis étendue dans le clan du Vent. Rien de dangereux à l’horizon qui ne souhaite perturber mes éternelles habitudes, une odeur de feuille de pin et du gibier qui pousse à une vitesse ahurissante décapent mes narines. Les guerriers dorment encore dans leurs tanières puisque le jour se lève à peine, mais aujourd'hui, j'en ai décidé autrement. Moi, éternelle plume emprisonnée dans de l'ambre, je vais découvrir les entrailles de là où réside les bipèdes. Pour cela, je me dois de quitter le clan avant que les patrouilles ne soient désignées.

J'essaye d'escalader le sapin qui borde le campement mais il se trouve que l'environnement me déplaît. Mes griffes ne s'accroche pas au tronc et je m'écroule lamentablement sur le sol duveteux. Je pourrais partir maintenant mais j'ai l'étrange sensation que mon pelage doit s’imprégner de l'odeur d'un conifère. En effet, si un apprenti suivait mes traces, je serais vraiment dans le pétrin. Enfin, après m'être esquintée de part en part, je m'en sors avec une touffe de brindille dans la gueule, suivant la direction qui me semble juste.

Le vent est contre moi et il hérisse mon pelage déjà couvert de saletés. Pétillante, je m'élance comme un lapin dans l'herbe. J'observe une souris puis lui mordille la queue, celle-ci se retourne, me regarde, et se faufile sous des petits rochers qui semblent échoués sur la verdure. Là où les plus vaillants se protègent de la chaleur, je vagabonde comme une folle sous le l'astre du jour en forme de demi-cercle. Ainsi, j'en oublie totalement mon appartenance au clan et j'imite tout ce qui me passe sous la truffe, du mieux possible.

Reprenant mon souffle, j'aperçois au loin une ombre fugitive, comme perdue dans ce paradis multicolore. Je me persuade que ce n'est rien d'autre qu'un prédateur inoffensif, puis je repars guillerette, dans le droit chemin. L'air me semble pure mais rien n'est si sûre puisque je ne sens que l'odeur du pin qui s'émane de moi. Enfin, je traverse les barrières qui sépare ses deux mondes, et ainsi, je me sens mieux, comme si la place des bipèdes était mon second foyer.

Faisant preuve d'une nouvelle agilité, j'escalade sans problème la haie en bois, puis parvint à me retrouver en haut de la tour des sans-fourrures. Je me dirige à une de ses extrémités, et laisse le vent guider mon pelage dans la direction qu'il désire. Soudain, une plaque en dessous de moi se dérobe et m'emporte avec elle. Je me retiens à l'aide de mes griffes pour ne pas tomber, le corps suspendu dans le vide. Désemparée, je lance haletante, le peur de mourir dans la voix :

<< Si quelqu'un d'autre que le clan des Étoiles pouvait m'aider... Ce serait gentil ! >>

~ L'espoir de la vie ~

PV: Griselle - Plume d'Ambre

---

---

Je me promenais tranquillement dans la forêt, cette forêt silencieuse que j'aime tant. C'est mon territoire et quiconque voudra y mettre les pattes sera renvoyé dehors avec un grand coup de patte dans le popotin.. mais pas aujourd'hui, j'ai envie d'aller me promener. Je me dirige vers la sortie. Il faut que je garde confiance en moi : par le chemin que j'empreinte, je n'ai qu'une petite parcelle de territoire des clans à traverser pour atteindre la ville. Je foulais le sol de la forêt de mes longues pattes, essayant d'être discrète et de passer inaperçue. Lorsqu'enfin j'arrivais près de la ville, un long hurlement m'arrêta net.

<< Si quelqu'un d'autre que le clan des Étoiles pouvait m'aider... Ce serait gentil !>>

Je regarde autour de moi, paniquée. Il fallait aider ce chat ! Où pouvait-il être ?! Je connais cette ville comme ma poche, je vais bientôt le trouver et lui venir en aide. Je cours vers mon impasse préférée, celle qui permet de monter sur les toits. Une fois sur les tuiles glissantes je regarde autour de moi. Le chat hurle encore mais je n'entend pas ce qu'il dit. Où est-il ? Soudain j'ai la révélation. Je lève la tête, encore et encore, puis je vois, en haut d'une des tours des bipèdes, un chat roux pâle suspendu dans le vide. Ses pattes arrières battaient le vide et, malgré la distance, je vis ses yeux équarquillés et son pelage qui avait doublé de volume sur le coup de la terreur. Je cours, de toit en toit, pour venir en aide à ce matou terrifié. Enfin j'escalade rapidement la tour -un jeu d'enfant pour moi- et le rejoins. Je lui hurle :

<< Tiens bon ! J'arrive ! >>

Je saute en avant, gardant tout de même un appui sur mes pattes arrières, me servant de ma queue comme corde, je l'ai enroulée autour d'un fin poteau noir. J'attrape le chat -non, pardon la chatte- par la peau du coup et tire de toutes mes forces. Bientôt, elle prend pattes sur le bord de la tour et se hisse au sommet. Epuisée, je dénoue ma queue et m'allonge au sol.

<< Tu vas bien ? >>

~ L'espoir de la vie ~

PV: Griselle - Plume d'Ambre

---

---

Encore suspendue dans le vide, je ferme les yeux pour oublier ce qui m'attend. Le cœur battant, j'ai l'étrange sensation de voir ma vie basculer, comme si bientôt mes pattes allaient m'abandonner à mon cruel destin. Le pelage hérissé, je tente tant bien que mal de garder mon calme. Pour ne pas m'évanouir, je me remémore des images de mon ancienne enfance. Ainsi, j'ai l'impression d'avoir des ailes* dans le dos et des félins qui m'épient, attendant probablement que je cède à la tentation de les déployer pour accomplir la prophétie. Soudain, j’entends derrière moi des bruits étranges provenant probablement des tuiles qui ornent les toits. Ma foi refait surfasse quand une voix féminine s'élève jusqu'à moi :

<<  Tiens bon ! J'arrive ! >>

Une seule pensée me fixe aux rebords, je vais vivre ! Pleine de joie, ma sauveuse saute dans le vide. J'écarquille les yeux, pensant qu'elle allait s'échouer lamentablement sur le sol, mais il se trouve qu'elle aussi possède une bonne étoile. Totalement abasourdie, je la regarde planer jusqu'à moi puis rentrer ses crocs dans mon cou. Paniquée, j'essaye de lui faire confiance même si l'idée qu'elle tombe avec moi ne me réjouis pas, loin de là. Je me débats légèrement et parvient à me hisser à la surface, heureuse d'en être sorti indemne. M'arrêtant quelques instants pour me lécher le pelage, je fixe sa queue accrochée à un poteau noir. D'une agile manière, elle la dénoue et s'allonge au sol avant de me demander :

<< Tu vas bien ? >>

Je l'observe attentivement, surprise d'une telle question. Cette chatte vient de me sauver la vie, comment puis-je aller mal ? D'instinct je m'écroule sur le sol en respirant fortement, essayant de mettre de côté la frayeur que j'ai ressenti précédemment. Puis énergiquement, je me relève et me dirige vers elle d'un sautillement de lapin, lui léchant l'oreille droite. Je ne l'ai jamais croisée auparavant, mais je lui en suis extrêmement reconnaissante. Me raclant la gorge, je n'ose pas lui répondre. Puis hésitante, je me lance enfin, bredouillant légèrement :

<< Je vais bien, mais... maintenant... j'ai une dette envers vous. Corps et âme, je serais là pour vous servir ! >>

~ L'espoir de la vie ~

PV: Griselle - Plume d'Ambre

---

---

Le visage de la rouquine était encore déformé par la frayeur qu'elle avait eue. En même temps, elle serait morte si elle était tombée, vu la hauteur. Mais comment était-elle arrivée aussi haut ? Par les toits, comme moi ? Ce n'était pas possible, elle sentait la forêt, elle devait y vivre, comme ces chats sauvages, elle ne connaissait pas assez la ville pour utiliser les toits.

<< Je vais bien, mais... maintenant... j'ai une dette envers vous. Corps et âme, je serais là pour vous servir ! >>

J'étais étonnée de la réponse de la chatte, un peu hésitante, malgré son air amical. Mais elle allait bien, apparemment, même si elle parlait bizarrement, et elle me vouvoyait ! Dans les rues, tous les chats se tutoyaient ! Un chat parlant comme ça, c'était très étrange, par ici. Je la regarde, un peu de travers malgré moi, puis je remarque qu'elle attend une réponse. Je miaule, intriguée :

<< Ne t'inquiète pas ! C'est normal d'aider un chat dans le besoin ! Tu n'as pas besoin de dette ! Et tu peux me tutoyer, je suis plus jeune que toi après tout.. je crois. >>

J'étais un peu mal à l'aise. C'était une chatte sauvage et moi, mon odeur de bipèdes devait se sentir à l'autre bout du monde. Je la regarde, vu son odeur de chats des forets, elle appartient surement à un clan. Je frissonne. Qui dit un clan, dit des chats.. mâles. Je n'ai pas peur d'elle, c'est une chatte comme moi, mais les autres.. je frissonne. Pour en avoir le coeur net, je demande :

<< Tu fais partie d'un clan ? Si oui, lequel ? >>

~ Nouvelle rencontre ~

PV: Griselle - Plume d'Ambre

---

---

La jeune sauveuse semblent surprise de ma réaction. Je l'observe, toujours aussi curieuse qu'à mon habitude, puis hésite quelques instants avant de baisser ma garde. Pour une fois depuis longtemps, j'ai osé adresser la parole à l'un des miens. Devant cette rencontre qui m'a sauvée la vie, qu'aurais-je pu faire d'autre ? Je baisse ma truffe devant elle comme pour l'aider à s'exprimer, et sans plus attendre elle s'est mise à me parler :

<< Ne t'inquiète pas ! C'est normal d'aider un chat dans le besoin ! Tu n'as pas besoin de dette ! Et tu peux me tutoyer, je suis plus jeune que toi après tout.. je crois. >>

Dans sa voix, j'ai ressenti de l'incertitude, une pointe de curiosité mêlée à de l'incompréhension. Quand je la regarde de nouveau, je m'aperçois qu'elle est mal à l'aise, et j'en deviens stressée malgré moi. Bredouillant légèrement, je tremble un peu en la dévisageant à mon tour, le ventre noué par ma vulnérabilité face à autrui. Prise à dépourvu, elle m'épie en frissonnant, est-elle terrifiée par ma personne ? N'ayant pas répondu, elle entame sans plus attendre :

<< Tu fais partie d'un clan ? Si oui, lequel ? >>

M’apprêtant à la vouvoyer, je me ravise. Faisant un effort de concentration, je me remémore de ses anciennes paroles. Elle semble pourtant gentille dans ce qu'elle me dit, peut-être qu'au fond, elle ne me déteste pas. Enfin, je me questionne sur sa question qui me semble étrange. D'autant plus que je ne l'ai jamais croisée auparavant lors des assemblés. Je m'assois prêt d'elle avant de poursuivre, d'un ton enjoué :

<< Je suis une Venteuse qui mange des pommes de pin ! Mais je suis désolé je ne vous... Je ne me souviens pas de toi... Tu es nouvelle ? >>

Je me remis à sautiller en essayant de me persuader qu'elle ne souhaite aucunement nuire à mon clan. Puis malgré le fait que je glisse souvent sur les tuiles, je me reprend toujours, plus entêtée que jamais à recommencer mes bonds dans les airs. Enfin, je m'arrête haletante devant elle, attendant une réponse qui anéantirait, je l'espère mes doutes et mes angoisses.